Artemisia des plantes essentielles contre la Malaria

Les Artemisia pourraient-elles permettre de venir à bout de la Malaria ?

Le genre Artemisia appartient à la famille botanique des Astéracées.

Ce genre regroupe quelque dix-sept espèces et quatre cents variétés de plantes. La plus grande diversité d’Artemisia se trouvent au sein de la flore asiatique où 150 variétés d’Artemisia ont été répertoriées en Chine, 50 au Japon et 34 espèces découvertes en Iran.

Cette famille comprend des essentiellement des plantes herbacées vivaces, comme par exemple Artemisia afra, l’armoise africaine, ou Artemisia absinthium la grande absinthe ou encore Artemisia vulgaris l’Armoise commune ou Armoise citronnelle. La pérennité de ces Artemisia est acquise grâce à des racines formant un pivot simple ou ramifié, parfois tubérisées (la molécule de réserve étant l’inuline, polymère du fructose, fibre alimentaire et prébiotique étudié pour son rôle sur le microbiote intestinal).

D’autres Artemisia sont, à l’instar d’Artemisia annua des plantes annuelles.

Noms vernaculaires des Artemisia.

Le genre nommé Artemisia doit son nom botanique à la déesse grecque Artémis. Le mot Artemisia signifie littéralement « plante d’Artemis ». Cf. Article Artemisia un don d’Artemis.

Artemis et Chiron

En français ces plantes sont parfois appelées « Artémise », mais le nom le plus commun de ces variétés de plantes est « Armoise »

En Anglais le nom le plus fréquent des Artemisia est « Wormwood ». Ce nom fait référence aux vertus vermifuges prêtées à certaines variétés d’Artemisia.

En Chine le nom des Artemisia est construit à partir du radical « hao » : ont trouve ainsi les noms « Qinhao » : « Hao bleu-vert » ou encore « Xiang hao » (« hao odorante). Ces deux noms correspondent à Artemisia apiacea dans la pharmacopée traditionelle (et non à Artemisia annua comme on lit souvent). Huang hua hao « hao à fleur jaune » est la variété qui correspond à Artemisia annua.

Artemisia apiacea

.Artemisia et traitement de la malaria

Pharmacopée méditerranéenne

Les premiers herboristes du pourtour méditerranéen, utilisèrent les qualités liées à l’amertume des Artemisia. En effet, les herbes amères stimulent le système digestif, stimulent le foie et renforcent le système immunitaire. Les armoises furent également utilisées pour leurs vertus vermifuges, emménagogues et abortives.

Parmi les armoises méditerranéennes, l’absinthe (Artemisia absinthium) se distingue par son ancienne réputation, aujourd’hui presque oubliée de guérir les fièvres paludiques.

Pourtant cette plante fut prescrite au sein de l’armée au XIXe siècle pour lutter contre la malaria. Ce fut notamment le cas, de 1844 à 1847, lors de la colonisation de l’Algérie.

Artemisia absinthium

À propos des usages antipaludiques de l’absinthe FJ Cazin écrit dans son Traité pratique & raisonné des plantes médicinales indigènes publié en 1868 les lignes suivantes :

« L’absinthe est une des plantes indigènes les plus précieuses. Les anciens ont célébré ses vertus. Galien la regardait comme un puissant tonique, et cette opinion est encore celle des médecins les plus distingués de nos jours. Lupis (Journal de pharmacie, t. XIV, p. 62.) a publié de nombreuses observations constatant que l’extrait d’absinthe, donné à la dose de 2 à 4 grammes, a guéri des fièvres intermittentes de divers types. Ce fébrifuge a réussi entre les mains de Pinel (8), qui l’employait fréquemment à l’hôpital de la Salpêtrière ; dans celles d’Alibert ; de Burtin (9) ; de Wauters, qui l’a proposé comme succédané du quinquina et du Quassia amara.

Chaumeton, dont l’incrédulité en matière médicale indigène est connue, s’exprime ainsi sur les propriétés fébrifuges de l’absinthe : « J’ai mille fois employé cette plante avec succès pour la cure des fièvres intermittentes de tous les types : lorsque j’avais à traiter une simple tierce, je me contentais de prescrire une légère infusion des feuilles et des sommités : s’agissait-il d’une quotidienne ou d’une quarte, je faisais prendre chaque jour 30 grammes de vin d’absinthe, et si je remarquais des obstructions abdominales, je diminuais la quantité de vin et j’administrais tous les matins 2 grammes d’extraits. » Bodart a subjugué plusieurs fièvres intermittentes rebelles au moyen du suc d’absinthe fraîche aromatisé avec un peu de jonc odorant, à la dose d’une demi-cuillerée, administrée à plusieurs reprises dans un véhicule vineux.

J’ai souvent employé l’absinthe dans les marais du Calaisis contre les fièvres intermittentes, quand l’état des voies digestives me le permettait. Elle m’a surtout réussi dans les cas de récidive, après un long usage des préparations de quinquina, et lorsque l’atonie générale, l’engorgement de la rate, la décoloration de la peau, l’infiltration du tissu cellulaire se présentaient comme symptômes consécutifs de l’intoxication miasmatique. Entre autres faits, je citerai celui d’un manouvrier âgé de quarante et un ans, d’un tempérament lymphatique, habitant une chaumière basse, non aérée, sur le bord d’une tourbière, et qui, depuis deux ans, était atteint d’une fièvre intermittente, plusieurs fois suspendue par l’usage du isulfate de quinine, et reparaissant ensuite sous divers types. Je vis ce malade en novembre 1832.

Atteint alors d’une fièvre quotidienne, il était accablé sous le poids de la misère et de la maladie. Les accès avaient peu d’intensité ; mais les extrémités inférieures étaient œdématiées, la face infiltrée et blafarde, la rate manifestement engorgée, la débilité très-grande. Le vin d’absinthe, à la dose de 60 grammes en augmentant graduellement jusqu’à celle de 150 grammes par jour, rétablit promptement les forces, augmenta la sécrétion urinaire, diminua peu à peu le volume de la rate, fit disparaître l’œdématie, intercepta les accès dans l’espace de six à huit jours, et amena un rétablissement complet, et non suivi de récidive, au bout de vingt jours de traitement.

Je me suis toujours très bien trouvé de l’emploi du vin d’absinthe dans l’anasarque provenant de fièvres intermittentes négligées ou se prolongeant sous l’influence permanente de l’humidité et des effluves marécageux. Je prévenais les rechutes en ajoutant à ce vin, après la disparition de l’hydropisie, 30 à 60 grammes de teinture de Mars tartarisée. J’ai employé ce mélange avec succès, non seulement dans la cachexie paludéenne, mais aussi contre la chlorose, la chloro-anémie, si fréquente dans les lieux où les fièvres intermittentes sont endémiques. [...]

Le sel essentiel d’absinthe produit par l’incinération de la plante, par lixiviation et évaporation, est principalement formé de carbonate de potasse, il était autrefois en grande faveur. Boerhaave donnait 2 gr. de ce sel à ceux qui ne pouvaient supporter le quinquina. On le croyait un ingrédient nécessaire à la potion antiémétique de Rivière (1 gr. 20 cent. de sel d’absinthe dans une cuillerée de suc de limon, à laquelle on ajoutait quelquefois une eau aromatique administrée au moment de l’effervescence. ) On prépare aujourd’hui cette potion avec une solution d’acide tartarique ou d’acide citrique ou le suc de citron et le bicarbonate de potasse, dont le sel d’absinthe ne diffère point. »

Concernant les études récentes menées sur les propriétés antipaludiques d’Artemisia absinthium, on peut lire l’article de Pierre Lutgen « Artemisia absinthium A forgotten antimalarial »

Pharmacopée africaine

En Afrique, l’espèce Artemisia afra, espèce vivace commune en Afrique du Sud qu’on retrouve en Afrique orientale tropicale jusqu’en Éthiopie est préconisée comme antipaludéen par différentes médecines traditionnelles.

Les études ethnobotaniques publiées à ce jour montrent que la décoction ou l’infusion de la plante est utilisée pour traiter la malaria en Afrique orientale et septentrionale : Éthiopie, Kenya, Tanzanie, Angola, Zimbabwe et Afrique du Sud.

En 1962, un livre de John Michell Watt, Breyer Brandwyck, Maria Gerdina, « The medicinal and poisonous plants of Southern Africa », Edtition Livingstone E &S Edingburgh mentionne que les extraits d’Artemisia afra sont plus efficaces contre les souches de Plasmodium falciparum que neuf autres plantes médicinales réputées antipaludéennes.

Artemisia afra est également utilisée pour traiter diverses affections (toux, fièvre, rhume, frissons, dyspepsie, perte d’appétit, troubles gastriques, colique, coqueluche, goutte, asthme, diabète, trouble de la vessie, troubles rénaux, grippe et convulsions). Les racines, les tiges et les feuilles sont utilisées en lavement, cataplasmes, infusions, lotions, inhalées (fumées) ou sous forme d’huile essentielle. En outre Artemisia afra est fréquemment utilisé comme antimite et dans les pulvérisations insecticides biologiques.

Utilisations traditionnelles d’Artemisia afra comme antipaludique en Afrique

Préparation préconisée Pharmacopée Références
Décoction de feuilles dans de l’eau en voie orale Zimbabwe, Kenya, Afrique du Sud (Lesotho) 1,2,3
Décoction de feuilles vertes ou séchées durant 20 minutes, 100 ml pour adultes, et 15 à 40 ml pour les enfants de moins de 5 ans Sous forme de poudre, 1 cuillère à soupe pleine en décoction dans 100ml d’eau Tanzanie 4,5
Infusion de feuilles dans de l’eau en voie orale Angola, Afrique du Sud 4,5
Infusion de feuille en voie orale et compresse de feuilles Afrique du Sud 6,7
Plante chauffée, fermentée Tanzanie 8
Pilât de feuilles fraîches et séchées avec du beurre VO. avec du café avant le repas du matin durant 3 jours Éthiopie 9

Références du tableau

1. Gelfand, M., S. Mavi, R.B. Drummond & B. Ndemera, The traditional medicinal practitioner in Zimbabwe. Mambo Press, Gweru (Zimbabwe), 411 p., (1985)
2. Okello, S.V., Nyunja R.O., Netondo G.W. & Onyango J.C., « Ethnobotanical study of medicinal plants used by Sabaot of Mt. Elgon Kenya », African Journal of Traditional, Complementary and Alternative Medicines Volume 7, No. 1, pp 1-10 (2010)
3. Phillips, E.P., « A contribution to the flora of the Leribe Plateau and environs » . Annals of the South African Museum 16 : 1–379 . (1917), The medical ethnobotany of Lesotho : a review. Bothalia 41,1 : 209–228 (2011)
4. Shauri, N.E.N., « Experience on the use of Tanzanian medicinal plants for the last decade (1979-1989) » Traditional Medicinal Plants. Dar Es Salaam University Press - Ministry of Health - Tanzania, 391 p. (1991)
5. Bossard, E., La médecine traditionnelle au centre et à l’ouest de l’Angola. Ministério da ciênciae da tecnologia. Instituto de investigaçâo cientifica tropical. Lisboa - p. 531 (1996) (ISBN : 972-672-858-4)
6. Coopoosamy, R. M. and K. K. Naidoo, « An ethnobotanical study of medicinal plants used by traditional healers in Durban, South Africa. », African Journal of Pharmacy and Pharmacology Vol. 6(11), pp. 818-823, 22 March, 2012
7. Watt, J.M., Breyer-Brandwijk, M.G., The medicinal and poisonous plants of southern and eastern Africa.E. & S. Livingstone Ltd., Edinburg and London, Second edition, 1457 p., (1962)
8. Kokwaro, J.O., Medicinal plants of East Africa., East african literature bureau, Kampala, Nairobi, Dar Es Salaam, 368 p., (1976)
9. Mesfin, F., S. Demisse1, T. Teklehaymanot, « An ethnobotanical study of medicinal plants in Wonago Woreda, SNNPR, Ethiopia », Journal of Ethnobiology and Ethnomedicine , 5:28 doi:10.1186/1746-4269-5-28 (2009)

Pharmacopée chinoise

La connaissance des vertus antipaludique de certaines armoises est très ancienne en Chine.

La médecine traditionnelle chinoise a ainsi notamment identifié comme plante permettant de soigner la malaria :

- « Qinhao » : « Hao bleu-vert » également appelée « Xiang hao » (« hao odorante) qui correspond à Artemisia apiacea

- Huang hua hao « hao à fleurs jaunes » correspond à Artemisia annua.

Shen Kuo (1031-1095) l’un des plus grands intellectuels de l’histoire chinoise, serait le premier à avoir distingué ces deux espèces d’Artemisia d’un point de vue botanique : il nota ainsi :

Shen Kuo

« Les variétés de Hao sont très nombreuses. Pour la catégorie Qing hao, il en existe deux : l’une jaune et l’autre émeraude. Il y a le genre que les Bencao appelle Qinghao, mais je crains qu’il en soit un autre qui doive être distingué.
Dans le Shaanxi, entre Sui et Yin, on trouve Qinhao au milieu de touffes de hao, parfois il y a une ou deux touffes qui sont nettement de couleur émeraude, la population locale les appelle xiang hao : « hao odorants ». Les tiges et les feuilles sont les mêmes que celles de Chang hao le « hao commun », mais alors que la couleur du hao commun est vert clair, la couleur de ce hao est émeraude (qing cui), juste comme la couleur du pin et du genévrier. Au plus profond de l’automne, quand les autres hao sont jaunes, ce type est le seul à rester émeraude ; son odeur (qi) est assez aromatique. Je suggère que c’est le type que les anciens utilisaient et préféraient. »
(Meng xi bi tan, p. 873)

Wushier bing fang « Ordonnance pour cinquante-deux maladies », trouvé sur le site archéologique de Mawangdui contient la première mention connue de qinghao 青. Sur ce rouleau de soie daté de -168, qinghao apparaît dans une recette contre les hémorroïdes féminines. La plante est préparée avec de l’urine. Ce mode préparatoire de Qinhao se retrouve régulièrement dans les livres de formules (fang ji shu) de la dynastie Tang (618-907), à la dynastie Song (960-1279).

Première mention de Qinhao

Jusqu’au VIIe siècle la première utilisation citée pour Qinhao est la cicatrisation des plaies.

Shennong bencao jing 神農本草 « Le Classique de la pharmacopée (Materia medica) du Laboureur Céleste », rédigé au premier siècle de l’ère chrétienne contient la première mention de l’utilisation en cas de fièvre intermittente de trois plantes caohao 草蒿, qinghao 青蒿 et fangkui 方溃. Cet usage est cité en second rang après la cicatrisation des plaies. Une troisième indication concerne l’augmentation de la longévité.

Shennong bencao jing

Au quatrième siècle de notre ère, le célèbre médecin et alchimiste Ge Hong consigne une mode préparation de Qinhao inédite dans le « Manuel de prescriptions des urgences » (« Zhou Hou Bei Ji Fang ») écrit en l’an 340.

On trouve dans ce traité la prescription suivante :

« Pour un bouquet de Qinghao, prenez deux sheng [2 × 0,2 l] d’eau pour le tremper, essorez-le, prenez le jus, ingérez-le dans son intégralité »

Ge Hong considère que la macération de la plante dans de l’eau avant de l’essorer et d’ingérer ensuite le jus exprimé est efficace pour traiter les fièvres intermittentes aiguës.

Zhou Hou Bei Ji Fang

La recommandation de macérat aqueux de Qinhao consigné par Ge Hong dans son recueil de recettes et des formulaires (fangji), ne retint pas l’attention des compilateurs ultérieurs de Pharmacopées (bencao) et ce n’est que 1200 ans plus tard que l’observation faite par Ge Hong a commencé à être intégrée dans les Pharmacopées. La recette de Ge Hong est citée pour la première fois dans Bencao gangmu (Classified Compendium) du médecin, herboriste et naturaliste chinois Li Shizhen 1518 -1593.

Pendant cet intervalle l’urine restera le solvant préconisé dans les bencao. L’utilisation de l’urine était probablement empreinte de significations symboliques. Mais des raisons pratiques poussaient peut-être également les médecins à utiliser l’urine. Cette pratique était probablement due à la qualité bactériologique supérieure de l’urine vis-à-vis de l’eau au regard des conditions sanitaires précaires de l’époque. L’urine peut par ailleurs avoir optimisé le processus d’extraction de sesquiterpènes et d’autres substances actives de la plante.

À partir du Bencao tujing 本草圖經 (Règles de la Pharmacopée), rédigé en 1062 par Su Song, la fièvre intermittente tendit à devenir la première indication des Artemisia (caohao, qinghao, fangkui macérées dans l’urine). La notion de fièvre intermittente renvoyant de manière générale aux syndromes fébriles et non spécifiquement aux accès palustres. Cette même période consacra aussi l’emploi de feuilles de qinghao en fumigations, c’est-à-dire brûlées dans et à proximité des habitations pour leurs vertus insecticides.

Il est possible que l’utilisation accrue de Qinghao pour prévenir et traiter les fièvres intermittentes soit liée à la montée en flèche de ces fièvres pendant la dynastie des Song qui a régné en Chine entre 960 et 1279 en raison des nouvelles technologies agricoles développées alors telles que la riziculture inondée qui ont créé un terreau idéal pour la prolifération du moustique vecteur du paludisme.

Aménagement du paysage héritier de la dynastie Song.

Le traitement des fièvres comme indication première des Artemisia Caohao, Qinghao, Fangkui, Xinhao et Haoqin macérées dans l’urine ou utilisée fraîche est mentionné dans les Bencao :

- Zhenzhu nang buyi yao xing fu 珍珠囊補遺藥性賦 (Pearl Bag with Rhapsodies on the Properties of Drugs) du XIIe siècle attribué à Li Gao ;
- Bencao pinhui jingyao 本草品匯精要 (Pharmacopée essentielle classée par importance) datée de 1505 écrit par Liu Wentai ;
- Bencao mengquan 本草蒙筌 (Illumination de la materia medica) écrit en 1565 by Chen Jiamo.

On retrouve une description de Qinhao et les préconisations qui lui sont associées dans le Ben Cao Gang Mu 本草纲目 Grand Traité d’herbologie rédigé entre 1552 et 1578. par Li Shi Zhen qui entreprit un travail de compilations des ouvrages anciens. Concernant l’usage des Artemisia il exhuma le mode préparatoire (macération aqueuse préconisée un millénaire plus tôt par Ge Hong. Il reprit également les considérations botaniques de shen Kuo et sur les bases de son étude personnelle stabilisa la distinction des Armoises que la botanique actuelle appelle Artemisia apiacea et Artemisia annua. Il attribua à la première, l’herbe émeraude et fragrante, le nom qinghao et à la seconde l’herbe jaune pâle celui de huanghuahao.

Ce traité est par la suite resté jusqu’à aujourd’hui une référence des médecins traditionnels chinois qui continuent à respecter son enseignement.

L’ invasion occidentale de la Chine au début du XXe siècle et l’effondrement de la dynastie Qing qui s’en suivit ont introduit pendant plusieurs décennies un chaos dans le pays, et une montée en puissance de l’influence occidentale sur presque tous les aspects de la vie, y compris les questions de santé.
Un mouvement de rejet des systèmes traditionnels fut initié par le gouvernement nationaliste du Guomindang qui aspirait à une modernisation, à la reconnaissance de la science occidentale. Ainsi de nombreux praticiens furent formés à la médecine occidentale et contribuèrent à l’essor de la médecine dite « moderne ».
L’influence occidentale a ainsi entraîné un déclin relatif de la transmission des savoirs issus de la tradition.

L’histoire de la redécouverte des propriétés des Artemisia a eu pour contexte la révolution culturelle chinoise (1966-1976) un mouvement initié et voulu par Mao Zedong marqué par de brutaux changements politiques et la crainte féroce de la répression notamment dans les milieux scientifiques. Ce contexte était paradoxal, car l’héritage culturel de l’Empire chinois était considéré d’une part comme source d’obscurantisme et comme un frein au progrès de la nation, d’où une volonté farouche de l’éradiquer, les campagnes de rééducation politique en étant un exemple immédiat, mais dans le même temps le « grand timonier » qualifiait ce même héritage de « salle aux trésors » à même de servir le peuple.

Autodafé pendant la Révolution culturelle. Avait été décrétée la lutte contre les « quatre vieilleries », les idées, la culture, les coutumes, et les habitudes, soit tout ce qui est d’avant 1949. Photo Zhou Thong. AKG-Images

Confrontées en 1967, à une forte recrudescence du paludisme dans les provinces du sud, les autorités chinoises ont lancé un programme national impliquant plusieurs centaines de scientifiques chinois. Une partie de ce projet, appelée « Programme 523 », consista à explorer la phytothérapie traditionnelle chinoise.

Dans le cadre de ces recherches, des scientifiques de l’Institut de Materia Medica de Pékin ont découvert une région de la Chine qui ne signalait aucun cas de paludisme. Leur enquête a montré que ses habitants buvaient une décoction d’Artemisia annua dès les premiers symptômes du paludisme.

Cette redécouverte des vertus d’Artemisia annua bénéficia à l’armée nord-vietnamienne qui luttait alors contre l’armée américaine. En effet dans les premières années de la longue guerre du Vietnam, le Viêt-Cong qui opérait dans les marécages et les forêts tropicales perdait plus de soldats du fait de la malaria que lors des combats. Confronté à cette situation Ho Chi Min se tourna vers la Chine pour obtenir une aide médicale.

Soldats du Viêt-Cong

L’envoi de tonne d’Artemisia annua par le "grand frère chinois" à son allié, délivra de manière spectaculaire les soldats du Viet-Công du fléau de la malaria. Boire la simple infusion de tiges feuillées de la plante permettait de guérir de la maladie en quelques jours et de prévenir sa survenue ou sa récidive.

La découverte de l’artemisinine

Par la suite, les chercheurs chinois ont entamé des études poussées de la composition de la plante miraculeuse ce qui aboutira à l’identification et à la synthèse d’un des principes actifs d’Artemisia annua, l’artemisinine.

Alexandre SANNER, auteur d’une thèse de médecine intitulée « L’artemisinine et ses dérivés : apports de la médecine traditionnelle chinoise dans la lutte contre le paludisme chimioresistant » décrit le processus de découverte ainsi :

« En août 1972 une première publication clinique rapporte que 21 patients de Pékin atteints de paludisme ont été traités avec des extraits de qinghao, ce avec succès pour 90% d’entre eux. À cette époque la structure de l’artémisinine n’est pas encore connue et c’est en 1973 que l’équipe du professeur Tu Youyou aboutit à la synthèse de la dihydroartémisinine pour prouver que le principe actif (su en chinois) a un groupe cétone : elle ignore alors que cette dihydroartémisinine se révèle bien plus efficace sur les plasmodies que le composant naturel, l’artémisinine ou qinghaosu.

D’autres dérivés de l’artémisinine sont rapidement synthétisés dans les villes de Shanghai et Guangzhou et des entreprises pharmaceutiques à Kunming (Kunming Pharmaceutical Corporation) et Guiling passent à la production agricole d’armoise annuelle. Ces mêmes firmes sont encore aujourd’hui les principaux pourvoyeurs en dérivés de l’artémisinine et donc incontournables pour les laboratoires occidentaux.

Mais la découverte chinoise se perd alors dans l’océan du mépris occidental pour la médecine traditionnelle dans un contexte d’extrême méfiance à l’égard de Mao. Le qinghaosu diffuse uniquement dans la sphère d’influence de Pékin : Vietnam, Cambodge et sud de la Chine où 20 millions de malades souffrent alors du paludisme. Ces nouveaux médicaments ne passent pas à l’Ouest également du fait de l’efficacité des traitements déjà disponibles jusqu’à la fin des années 1980, et du fait qu’à l’époque, le paludisme était beaucoup mieux contrôlé que maintenant.

Quand on voit la notoriété actuelle de l’artémisinine, on ne peut imaginer à quel point nous en ignorions tout à l’époque » témoigne Gilles Roche directeur du programme Impact Malaria chez Sanofi-Aventis.

Au cours des années 1990, la prise de conscience de l’aggravation des résistances s’opère et les laboratoires occidentaux dont l’image a été largement écornée par leur refus du développement de médicaments génériques notamment dans le traitement du sida tentent de se racheter une moralité en s’intéressant à un marché considéré comme insolvable car africain.

L’OMS consacre définitivement cette nouvelle classe d’antipaludiques en novembre 2001 en affirmant que « le plus grand espoir mondial de fournir un traitement au paludisme vient de Chine ».

La première utilisation à grande échelle en Afrique d’un dérivé de l’artémisinine a lieu au Kwazulu-Natal (Afrique du Sud) où le Ministère de la Santé recommande dès 2000 le recours à des thérapies combinées artéméther-luméfantrine sur la base de travaux thaïlandais. Elle confirme les attentes : la région a en effet connu de 1995 à 2000 une dramatique augmentation de la mortalité palustre liée à une réinvasion du vecteur Anopheles funestus hautement anthropophile et résistant aux pyréthrinoïdes ainsi qu’à des résistances croissantes de Plasmodium falciparum à la sulfadoxine-pyriméthamine ; en l’espace d’un an l’emploi des combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (Artemisinin based Combined Therapies en anglais) et la réintroduction concomitante du DDT (pulvérisations intradomiciliaires) permettent une chute des décès et des admissions de 89 %, deux ans plus tard les décès liés au paludisme grave ont diminué de 97 %.

Aujourd’hui de Novartis à Sanofi-Aventis en passant par Glaxo-Smith-Kline, tous les géants de l’industrie pharmaceutique commercialisent ou annoncent la mise à disposition dYACTs.

Ils rivalisent d’annonces tendant à démontrer leur volonté de renoncer à faire du profit dans ce domaine avec des partenariats financés sur des fonds publics qui sont montés. »

En 2015, l’une des chercheuses du programme 523, la Professeur. Tu Youyou se voit décernée un prix Nobel de médecine pour la découverte de l’artemisinine.

Cette consécration tardive, quatre décennies après les études publiées à ce sujet par les scientifiques chinois, occulte l’information essentielle en matière de lutte contre la malaria.

Cette information qui pourrait peut être de mettre fin au fléau de la malaria dans le monde est qu’une simple infusion de l’extrait brut d’une plante avait permis à une armée entière de plus être affectée par la malaria, et que depuis des générations les populations de certaines régions chinoises se prémunissaient facilement de la maladie au moyen de cette même infusion.

L’expérience historique de l’armée vietnamienne d’une part et l’expérience sur la très longue durée de la population chinoise montrent qu’il n’est nul besoin de traitements sophistiqués et onéreux pour prévenir et guérir du paludisme sans effets secondaires et sans apparition de résistance du vecteur de la maladie.

En fait, cette information de la possibilité pour les populations affectées par le paludisme de mettre un terme à ce fléau par la simple culture d’une plante médicinale est rapidement devenue scandaleuse.

Elle est un scandale pour l’industrie pharmaceutique qui se verrait privée de la rente apportée par son monopole de la médication.

C’est pourquoi elle s’efforce depuis de discréditer toute initiative promouvant l’usage antipaludique des extraits d’Artemisia annua.

Il n’y a pas lieu de s’étonner que l’OSM, l’Organisation Mondiale de la Santé réprouve également l’usage d’Artemisia annua et n’encourage aucune étude clinique à ce sujet, car cet organisme qui fait autorité en matière de santé dans le monde est lui-même financé par l’industrie pharmaceutique.

Le véritable scandale en matière de lutte contre le paludisme est celui que le documentariste Bernard Crutzen a mis en images de manière implacable et édifiante : le « Malaria Business » au nom duquel toute alternative à la marchandisation de la santé se voit condamnée et découragée.

Malaria business : les laboratoires contre la médecine naturelle ?

Malgré les pressions exercées pour discréditer les travaux et recherches sur le potentiel thérapeutique des extraits d’Artemisia la détermination de libres penseurs et d’organisations sans but lucratif mènent d’intéressantes actions et études cliniques et apportent des preuves supplémentaires de l’intérêt pour les population impaludés de médicaments à base d’extraits d’Artemisia.

Les résultats des études cliniques qu’ils ont encouragés et soutenus est l’objet article dédié sur le site de La Vie Re-Belle.

Mis en ligne par La vie re-belle
 6/08/2019
 https://lavierebelle.org/artemisia-des-plantes-essentielles

Prévenir et guérir la malaria

L’expérience historique de certaines médecines traditionnelles notamment chinoise et africaine notamment d’une part, des recherches phytopharmacologiques et des études cliniques récentes d’autre part montrent qu’il serait possible de prévenir et de guérir la malaria à l’aide de certaines plantes de la famille des Artemisia.

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