Quand la recherche se tourne vers des plantes oubliées

Prévenir et guérir la Malaria grâce à des plantes oubliées

En mars 2011 la revue scientifique Malaria Journal a publié un numéro hors série consacré aux perspectives thérapeutiques que pourrait ouvrir l’étude de préparations antipaludiques à base de substances naturelles faisant partie des pharmacopées traditionnelles.

Ce numéro atypique rassemblait les résultats de recherches menées par des scientifiques de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), de l’Africa Network for Drugs & Diagnostics Innovation(ANDI), de l’Université d’Oxford, de la fondation Medicines for Malaria Venture (MMV) et de l’Université de Cape Town en Afrique du Sud (UCT).

Une telle initiative étant rare nous tenons à relayer les travaux de ces chercheurs en présentant les résumés de chacun des articles des scientifiques qui ont été publiés et les liens vers les articles complets en anglais.

Pour introduire ce florilège de contributions scientifiques, voici la présentation de cette initiative publiée par l’IRD dans son Bulletin d’actualité scientifique de juin 2011 :

Paludisme : à la recherche de plantes oubliées

Face à l’émergence inattendue de résistances à l’artémisinine, le traitement du paludisme le plus répandu, l’industrie pharmaceutique risque de se retrouver bientôt démunie devant le fléau. L’arsenal thérapeutique contre cette maladie parasitaire demeure bien pauvre. Mais les plantes restent une ressource potentielle de nouvelles molécules largement inexplorée à ce jour. Dans un numéro spécial de la revue Malaria Journal, des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires rappellent que 90 % des espèces végétales sont méconnues. Un véritable vivier pour élaborer les médicaments antipaludiques de demain.

Le parasite résiste

Aujourd’hui, 40 % de la population mondiale est exposée au paludisme, soit plus de 2,5 milliards de personnes. Trois millions en meurent chaque année, principalement en Afrique. Pourtant la pandémie, véhiculée par les moustiques anophèles, avait été efficacement endiguée dans de nombreux pays. Mais elle est en pleine recrudescence depuis le début des années 1980. En effet, le parasite responsable, Plasmodium falciparum, a su déjouer les médicaments de synthèse classiques, qu’ils soient administrés en monothérapie ou combinés, et a peu à peu développé des résistances à ces traitements. Même l’artémisinine, jusque là épargnée, a vu récemment se développer des formes résistantes du parasite, notamment en Guyane et en Asie. Devant ce phénomène – et en l’absence de vaccin –, le besoin de nouvelles molécules actives contre Plasmodium falciparum est constant.

Le déchiffrage du génome du parasite en 2002 a suscité de grands espoirs dans la communauté scientifique. Mais huit ans plus tard, bien que des douzaines de composés médicinaux aient démontré des propriétés antipaludiques, très peu d’entre eux ont dépassé le stade du test préclinique. De nouvelles approches pour le développement de médicaments doivent donc être envisagées… ou bien les anciennes revisitées.

Le « quinquina de Cayenne » est connu en Amérique latine pour ses propriétés antipaludiques. Les chercheurs s’inspirent des remèdes traditionnels pour isoler à partir de la biodiversité tropicale de nouvelles molécules ayant une activité contre cette parasitose.

L’apparition de résistances à l’artémisinine, le traitement du paludisme le plus répandu à ce jour, relance la recherche de molécules actives contre le parasite Plasmodium falciparum responsable de la maladie. Dans un numéro spécial de la revue Malaria Journal, des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires soulignent l’énorme potentiel que recèlent les plantes. Si ces dernières composent déjà de nombreux produits pharmaceutiques, la flore mondiale demeure largement inexploitée, 90 % restant méconnue. Pour découvrir les médicaments de demain, la recherche médicale doit revisiter les pharmacopées traditionnelles.

De fait, plus de 1 200 espèces végétales sont utilisées à travers la planète pour soigner le paludisme, dont bon nombre ont démontré une efficacité. C’est l’action conjointe de plusieurs molécules qui par un jeu de synergie amplifie l’activité antiparasitaire de l’une d’entre elles et fait la force des remèdes traditionnels. La recherche de ces synergies ouvrira de toutes nouvelles pistes thérapeutiques. En termes d’accès au traitement, exploiter des ressources naturelles locales augmenterait la disponibilité des médicaments et réduirait leur coût pour les populations.

Des médecines traditionnelles à reconsidérer

Depuis des millénaires, les plantes sont le pilier de la médecine. Les papyrus égyptiens datant de 4 500 avant J.-C, les tablettes assyriennes 2 000 ans avant J.-C., puis l’Ayurveda en Inde et la médecine traditionnelle chinoise, toujours d’actualité, ont amplement documenté leur usage. Ces connaissances ancestrales continuent d’inspirer la médecine moderne et les plantes fournissent des composés essentiels pour de nombreux produits pharmaceutiques, comme l’artémisinine issue de la fameuse plante chinoise Artemisia annua. Plus des trois quarts des habitants de la planète se soignent grâce à elles. Dans certains pays asiatiques et africains, pour 80 % des personnes atteintes de fièvre palustre, la première réponse est de se tourner vers les traitements traditionnels.

D’après la méta-analyse réalisée par l’équipe de recherche, plus de 1 200 espèces végétales sont utilisées aujourd’hui contre cette maladie à travers le monde. Toutes constituent potentiellement une piste pour de nouvelles voies thérapeutiques. D’ailleurs, nombre de plantes issues des pharmacopées traditionnelles ont effectivement démontré une activité antiparasitaire. Ainsi, une molécule active contenue dans le « quinquina de Cayenne », une plante sud-américaine utilisée en décoction, vient de faire l’objet d’un dépôt de brevet en 2010 par des chercheurs de l’IRD et leurs partenaires (l’Institut Pasteur, et le CNRS). Afin de prioriser les plantes les plus efficaces pour les recherches futures, la présente étude propose une nouvelle méthode de notation des remèdes traditionnels. Basée sur des critères ethnobotaniques et des données cliniques, cette dernière attribue un score à chaque remède en fonction de son efficacité in vivo et in vitro et de sa sûreté.

Les extraits bruts sont plus efficaces

Par ailleurs, selon cette étude, l’utilisation d’extraits bruts de plantes, administrés sous forme de boisson ou encore de cataplasme, peut s’avérer plus efficace que les composés les plus actifs isolés en médicaments. Par exemple, pour un résultat équivalent, le thé préparé avec Artemisia annua selon le dosage recommandé par la médecine traditionnelle chinoise contient un total de 94,5 mg/l d’artémisinine, soit seulement 20 % de la dose journalière prescrite habituellement dans le cadre du traitement conventionnel. L‘équipe de recherche explique ce phénomène par une synergie avec d’autres composés de l’extrait végétal qui ne sont pas actifs par eux-mêmes. Chez Artemisia annua, il a été démontré que sur les 36 molécules appelées flavonoïdes présentes dans l’infusion, cinq amplifient l’efficacité de l’artémisinine, alors que seules, elles n’ont aucune activité antiparasitaire.

L’efficacité de futurs médicaments issus des pharmacopées traditionnelles repose sur cette synergie entre divers composés de la plante. Si c’est là l’une des principales difficultés pour repérer de nouvelles molécules actives, la recherche de produits « synergisants » constitue une approche très prometteuse pour de nouvelles pistes thérapeutiques. Par ailleurs, dans un souci de faciliter l’accès au traitement à terme, l’étude souligne que l’exploitation des ressources naturelles locales améliorerait considérablement la disponibilité des médicaments, à un coût acceptable pour les populations.

Rédaction DIC — Gaëlle Courcoux
Actualité scientifique de l’IRD. N° 378 – Juin 2011

Natural products for the control of malaria

Articles du numéro spécial de la Revue Malaria Journal n° 10 « Natural products for the control of malaria », Revue coordonnées par y Hagai Ginsburg

1. Hagai Ginsburg and Eric Deharo
« A call for using natural compounds in the development of new antimalarial treatments – an introduction »

2. Eric Guantai and Kelly Chibale
« How can natural products serve as a viable source of lead compounds for the development of new/novel anti-malarials ?

3. Timothy NC Wells
« Natural products as starting points for future anti-malarial therapies : going back to our roots ? »

4. Philippe Rasoanaivo, Colin W Wright, Merlin L Willcox and Ben Gilbert
« Whole plant extracts versus single compounds for the treatment of malaria : synergy and positive interactions »

5. Eric Deharo and Hagai Ginsburg
« Analysis of additivity and synergism in the anti-plasmodial effect of purified compounds from plant extracts »

6. Bertrand Graz, Andrew Y Kitua and Hamisi M Malebo
« To what extent can traditional medicine contribute a complementary or alternative solution to malaria control programmes ? »

7. Merlin Willcox, Françoise Benoit-Vical, Dennis Fowler, Geneviève Bourdy, Gemma Burford, Sergio Giani, Rocky Graziose, Peter Houghton, Milijaona Randrianarivelojosia and Philippe Rasoanaivo
« Do ethnobotanical and laboratory data predict clinical safety and efficacy of anti-malarial plants ? »

8. Merlin L Willcox, Bertrand Graz, Jacques Falquet, Chiaka Diakite, Sergio Giani and Drissa Diallo
« A “reverse pharmacology” approach for developing an anti-malarial phytomedicine »

9. Ivan Addae-Mensah, Foluke Fakorede, Andreas Holtel and Solomon Nwaka
« Traditional medicines as a mechanism for driving research innovation in Africa »

10. Patrice N Mimche, Donatella Taramelli and Livia Vivas
The plant-based immunomodulator curcumin as a potential candidate for the development of an adjunctive therapy for cerebral malaria »

11. Marta Ferreira Maia and Sarah J Moore
« Plant-based insect repellents : a review of their efficacy, development and testing »

Cassia occidentalis, Lippia chevalieri et spilanthes oleraceae, trois plantes composant le MALARIAL V, un médicament traditionnel amélioré élaboré au Mali et administré sous forme de tisane après des études menées pour déterminer l’efficacité, la qualité, l’innocuité, la mise en forme galénique et des essais cliniques comparant le Malarial V à la chloroquine.

Résumés des articles
et liens vers les textes

Hagai Ginsburg and Eric Deharo

Appel à l’utilisation de composés naturels dans le développement de nouveaux traitements antipaludéens - Une introduction

Titre original : A call for using natural compounds in the development of new antimalarial treatments – an introduction

Résumé :

Les composés naturels, notamment d’origine végétale, sont le socle de la médecine traditionnelle depuis des milliers d’années. Ils ont également été à l’origine de médicaments essentiels de la médecine moderne, mais la voie de l’extraction de composés naturels a été délaissée au cours de la seconde moitié du XXe siècle. L’avantage des composés naturels pour le développement de médicaments provient de leur affinité innée pour les récepteurs biologiques.

Les composés naturels ont fourni les meilleurs antipaludéens connus à ce jour. Des enquêtes récentes ont identifié de nombreux extraits de diverses matières organiques principalement végétales ayant une activité antiplasmodiale.

Il est important de noter que dans de nombreux cas ; l’extrait biologique brut est pharmacologiquement plus efficace que le composé purifié le plus actif de cet extrait. Ce fait pourrait être dû à la synergie avec d’autres composés présents dans l’extrait, qui en tant que tels n’ont aucune activité pharmacologique.

La médecine traditionnelle utilise des extraits bruts. Il a souvent été démontré que ces préparations agissent plus sur la globalité de la maladie que sur l’agent causal lui-même.

Les médicaments traditionnels sont utilisés par environ 80% des Africains comme première réponse à la maladie. Beaucoup de médicaments traditionnels ont des activités antiplasmodiales démontrables.

Cet article est suggère qu’une évaluation rigoureuse des médicaments traditionnels impliquant des essais cliniques contrôlés, parallèlement au développement agronomique de la culture des plantes médicinales pour obtenir des taux de composés actifs plus reproductibles permettrait d’améliorer la disponibilité de médicaments à un coût acceptable tout en créant une source de revenus dans les pays ou les fièvres paludiques sont endémiques.

Article complet

Texte en version pdf ci-dessous :

Solanum nudum

L’arbuste Solanum nudum, appelé notamment appelée Zapata ou Zapatico en Amérique latine est utilisée pour réaliser des préparations antipaludéennes par des communautés d’Amérique centrale et dans la zone Caraïbe.

Eric Guantai and Kelly Chibale

Comment les produits naturels peuvent-ils constituer une source viable de composés pour le développement d’antipaludéens inédits ?
 
Titre original : How can natural products serve as a viable source of lead compounds for the development of new/novel anti-malarials ?

Résumé :

Le paludisme continue de poser un énorme problème de santé mondiale, des millions de nouvelles infections et de décès étant signalés chaque année. Cette situation est en partie due au développement de la résistance du parasite du paludisme à la majorité des médicaments antipaludiques établis, une situation qui continue à entraver les tentatives de contrôle de la maladie.

Ce constat a conduit à un regain des efforts de recherche de nouveaux médicaments extrêmement actifs. L’identification de composés prometteurs provenant de sources naturelles augmenterait considérablement les possibilités de succès de ces efforts.

Actuellement, mis à part les composés fondés sur des produits naturels historiques les médicaments les plus récents ne contiennent aucun autre composé. Ils ont été réalisés dans le cadre de projets d’optimisation de formules préexistantes.

Les recherches de médicaments à base de nouveaux extraits naturels n’en sont qu’à un stade préclinique ces dernières années.

Cet article présente brièvement à la fois des approches classiques ainsi que des approches plus modernes, mais sous-utilisées, qui ont été appliquées en dehors du domaine du paludisme et qui pourraient être prises en compte pour renforcer le potentiel des produits naturels à fournir ou à inspirer le développement de composés antipaludiques.

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Tisane Saye utilisée dans le traitement du paludisme au Burkina Faso. Cette préparation médicinale à base de racine de Cochlospermum planchonii et de feuilles Phyllanthus amaru et Cassia alata a été soumise à une analyse de ses composés et à des essais cliniques

Timothy NC Wells

Les produits naturels comme points de départ pour les futures thérapies antipaludiques : un retour aux sources ?

Titre original : « Natural products as starting points for future anti-malarial therapies : going back to our roots ? »

Résumé :

Contexte :

La découverte et le développement de nouveaux antipaludéens sont à la croisée des chemins. La thérapie combinée à base d’artémisinine à dose fixe est maintenant utilisée pour traiter cent millions d’enfants chaque année, pour un coût aussi bas que 30 cents par enfant, et avec un taux de guérison supérieur à 95%. Cependant, comme pour toutes les stratégies anti-infectieuses, ce triomphe apporte les germes de sa propre chute, l’émergence de résistances. Il faut dix ans pour développer un nouveau médicament. De nouvelles classes de médicaments pour lutter contre le paludisme, résultant d’une infection par Plasmodium falciparum et Plasmodium vivax, sont nécessaires d’urgence.

Résultats

Les produits naturels ont été à la base de la majorité des médicaments antipaludiques actuels. Des molécules telles que la quinine, le lapachol et l’artémisinine ont été isolées à partir de médicaments à base de plantes. Après une amélioration de la chimie médicale et des technologies de formulation, et une association avec d’autres principes actifs, ils constituent désormais l’arsenal thérapeutique actuel. Ces dernières années, les progrès des technologies de dépistage ont permis de tester l’activité antipaludique de millions de composés. Ces initiatives ont abouti à l’identification de milliers de nouveaux composés actifs sous-micromolaires - points de départ pour de nouveaux programmes de découverte de médicaments. Dans ce contexte, la pénurie de produits naturels puissants identifiés a été décevante. Le moment est venu de réfléchir à l’approche actuelle en matière de dépistage des médicaments à base de plantes et de suggérer des révisions.

Il y a près de soixante ans, le médecin chinois Chen Guofu a suggéré que les produits naturels soient abordés selon « dao-xing-ni-shi » c’est-à-dire en inversant la pratique et les méthodes habituelles, c’est-à-dire en commençant par des études cliniques et l’observation.

Les produits naturels à base de plantes médicinales sont utilisés dans la communauté. Cette situation présente l’avantage unique potentiel que des données d’observation cliniques existent ou peuvent facilement être générées.

La première étape devrait être la confirmation et la définition de l’activité clinique des médicaments à base de plantes déjà utilisés par la communauté. Cette première étape constitue une base d’observations solide, avant de passer à la caractérisation pharmacologique in vivo et finalement d’identifier le principe actif.

Une grande partie de la population utilise des médicaments à base de plantes malgré un nombre limité d’études cliniques bien contrôlées. La prise de conscience accrue par les régulateurs et les organismes de santé publique de la nécessité d’informations sur la sécurité des médicaments à base de plantes favorise également l’obtention de davantage de données cliniques sur ces produits.

Conclusions

La rareté relative de nouveaux médicaments à base de plantes actifs contre le paludisme, révélée ces dernières années, suggère qu’il est temps de réévaluer l’approche « smash and grab » consistant à tester de manière aléatoire des produits naturels purifiés et de la remplacer par une approche fondée sur les données cliniques primaires. Cela nécessitera un changement de perspective de nombreuses personnes sur le terrain. Cela nécessitera un investissement dans la normalisation dans plusieurs domaines, notamment : l’ethnopharmacologie, la conception et la publication d’études d’observation clinique, des systèmes de caractérisation de l’activité antipaludique d’échantillons plasmatiques de patients ex vivo, suivis d’une caractérisation chimique et pharmacologique d’extraits de sources prometteuses. Ce travail ne relève pas du mandat principal des partenariats de développement de produits, et nécessitera donc un soutien supplémentaire. Cet appel est opportun, étant donné le vif intérêt des chercheurs des pays d’endémie pour soutenir le volet recherche du programme d’éradication du paludisme. Des institutions transnationales telles que le Réseau africain pour l’innovation dans les médicaments et les diagnostics (ANDi) joueront un rôle majeur en facilitant le développement de leur patrimoine de produits naturels et, éventuellement, des meilleures pratiques cliniques permettant de proposer de nouveaux traitements. Comme par le passé, avec la quinine, la lapinone et l’artémisinine, une fois que l’activité des médicaments à base de plantes chez l’homme est caractérisée, elle peut être utilisée pour identifier de nouveaux échafaudages moléculaires qui constitueront la base de la prochaine génération de traitements antipaludiques.

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Article au format pdf ci-dessous :

Philippe Rasoanaivo, Colin W Wright, Merlin L Willcox & Ben Gilbert

Extraits de plantes entières versus composés isolés pour le traitement du paludisme : synergie et interactions positives
 
Titre original :« Whole plant extracts versus single compounds for the treatment of malaria : synergy and positive interactions »

Résumé :

Contexte

En médecine traditionnelle, on utilise des plantes entières ou des mélanges de plantes plutôt que des composés isolés. Il a été prouvé que les extraits végétaux bruts ont souvent une activité antiplasmodiale in vitro et / ou in vivo supérieure à celle des constituants isolés à une dose équivalente. L’objectif de cet article est de passer en revue les interactions positives entre les composants d’extraits de plantes entières, ce qui peut expliquer cela.

Résultats

Des données montrent l’existence de plusieurs types d’interactions positives entre différents composants de plantes médicinales utilisées dans le traitement du paludisme. Une synergie pharmacodynamique a été démontrée entre les alcaloïdes de Cinchona et entre divers extraits de plantes traditionnellement combinés. Des interactions pharmacocinétiques se produisent, par exemple, entre les constituants de l’infusion d’Artemisia annua, de sorte que son artémisinine est absorbée plus rapidement que le médicament pur. Certains extraits de plantes peuvent avoir un effet immunomodulateur ainsi qu’un effet antiplasmodial direct. Plusieurs extraits contiennent des inhibiteurs de multirésistance aux médicaments, bien qu’aucun d’entre eux n’ait été testé cliniquement sur le paludisme. Certaines parties de plantes sont ajoutées principalement pour atténuer les effets secondaires d’autres, c’est le cas du rhizome de gingembre pour prévenir les nausées.

Conclusions

Des recherches cliniques supplémentaires sont nécessaires sur tous les types d’interactions entre les composants de plantes. Cela pourrait inclure des essais cliniques d’associations de composés purs (tels que artémisinine + curcumine + pipérine) et d’associations de plantes médicinales (telles que feuilles d’Artemisia annua + racine de Curcuma longa + graines de Piper nigum). Le premier peut renforcer l’activité des préparations pharmaceutiques existantes, et le second peut améliorer l’efficacité des remèdes à base de plantes existants pour une utilisation dans des régions isolées où les médicaments modernes ne sont pas disponibles.

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Eric Deharo & Hagai Ginsburg

Analyse de l’additivité et de la synergie dans l’effet antiplasmodial de composés purifiés extraits d’extraits de plantes

Titre original : « Analysis of additivity and synergism in the anti-plasmodial effect of purified compounds from plant extracts »

Résumé :

Dans la recherche d’antipaludéens d’origine ethnobotanique, les extraits de plantes sont fractionnés chimiquement et des tests biologiques guident l’isolement de composés actifs purs. Pour établir la responsabilité du ou des principe(s) actif(s) isolé(s) vis-à-vis de l’activité antiplasmodiale totale d’un extrait brut, les auteurs ont procédé à une revue de la littérature dans ce domaine et ont procédé à une analysée quantitative des résultats recueillis afin de déterminer la contribution du composé pur à l’activité de l’extrait entier. Il a été constaté que, généralement, l’activité de molécules isolées ne pouvait expliquer à elle seule l’activité de l’extrait brut. Les auteurs suggèrent que les recherches futures prennent en compte les "médicaments à côté du médicament", en recherchant les composés d’ordinaire écartés au cours du processus de fractionnement capables de stimuler l’activité de composés actifs isolés.

Article complet :

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Bertrand Graz, Andrew Y Kitua & Hamisi M Malebo

Dans quelle mesure la médecine traditionnelle peut-elle apporter une solution complémentaire ou alternative aux programmes de contrôle du paludisme ?

Titre original : « To what extent can traditional medicine contribute a complementary or alternative solution to malaria control programmes ? »

Résumé :

Des études récentes sur la médecine traditionnelle ont commencé à changer les perspectives sur ses effets et son rôle dans la santé de diverses populations. La sécurité et l’efficacité de certaines médecines traditionnelles ont été étudiées, ouvrant la voie à une meilleure collaboration entre les systèmes santé de modernes et traditionnels. Les médicaments traditionnels restent une ressource pour la santé largement inexploitée : ils ne sont pas seulement une source de nouvelles pistes pour la découverte de médicaments, ils peuvent également fournir des leçons et des approches novatrices pouvant avoir un impact direct sur la santé publique et l’économie. Pour optimiser cet impact, plusieurs interventions ont été suggérées, notamment la reconnaissance de la valeur économique et médicale de la médecine traditionnelle au sein du milieu universitaire et en matière de politique de la santé ; l’établissement de relations de travail avec les tradipraticiens ; l’établissement de preuves de la sécurité et de l’efficacité de la médecine traditionnelle locale par le biais d’études appropriées auprès de patients atteints de paludisme ; la diffusion des résultats pour les recommandations cliniques et l’élaboration de politiques de santé ; la mise en œuvre et l’évaluation des résultats des nouvelles politiques de santé intégrant officiellement la médecine traditionnelle.

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Merlin Willco & all

Les données ethnobotaniques et de laboratoire permettent-elles de prévoir l’innocuité clinique et l’efficacité des plantes antipaludiques ?
 
Titre original : « Do ethnobotanical and laboratory data predict clinical safety and efficacy of anti-malarial plants ? »

Résumé :

Plus de 1200 espèces de plantes ont été répertoriées dans des études ethnobotaniques pour le traitement du paludisme et de la fièvre. Il est donc important de hiérarchiser l’intérêt des plantes inventoriées pour le développement ultérieur de médicaments antipaludiques.

Le score d’efficacité « RITAM » a été conçu pour combiner les informations issues de recherches systématiques dans la littérature d’études ethnobotaniques publiées et d’études pharmacologiques de laboratoire sur l’efficacité et l’innocuité, afin de de hiérarchiser les plantes pour des recherches ultérieures. Il a été évalué en le corrélant avec les résultats des essais cliniques.

Le score d’efficacité issu des laboratoires était corrélé au taux d’élimination des parasites. Les données ethnobotaniques était en partie corrélée à l’élimination des symptômes cliniques, mais pas à l’élimination des parasites. La composante d’innocuité était difficile à valider, car toutes les plantes entrant dans les essais cliniques étaient généralement considérées comme étant sûres. Il n’y avait donc aucune donnée clinique sur les plantes toxiques.

Le score d’efficacité RITAM (en particulier les composants d’efficacité et de sécurité) peut être utilisé dans le cadre du processus de sélection afin de hiérarchiser les plantes pour des recherches ultérieures en tant que candidats-médicaments antipaludiques. La validation dans cette étude reste limitée par le très petit nombre d’études cliniques disponibles et l’hétérogénéité des patients.

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Vernonia amygdalina

Calcul du score RITAM pour la décoction de feuilles de Vernonia amygdalina

Merlin L Willcox & all

Une approche « pharmacologique inversée » pour développer une phytomédecine antipaludique
 
Titre original : « A “reverse pharmacology” approach for developing an anti-malarial phytomedicine »

Résumé :

Une approche « pharmacologique inversée » pour développer une phytomédecine antipaludique a été conçue et mise en œuvre au Mali, donnant lieu à un nouvel antipaludique végétal standardisé après six années de recherche. La première étape consistait à sélectionner un remède à développer par le biais d’une étude rétrospective des résultats du traitement. La deuxième étape consistait en un essai clinique évaluant les réponses au remède administré à doses croissantes pour choisir la dose la plus sûre et la plus efficace. La troisième étape consistait en un essai contrôlé randomisé visant à comparer la phytomédecine au traitement standard de première intention. La dernière étape consistait à identifier les composés actifs pouvant être utilisés comme marqueurs pour la normalisation et le contrôle de la qualité. Cet exemple de « pharmacologie inverse » montre qu’une phytomédecine standardisée peut être mise au point plus rapidement et à moindre coût que les médicaments conventionnels. Même si les deux approches ne sont pas totalement comparables, leur efficacité en termes de santé publique et leur complémentarité doivent être examinées de manière approfondie.

Texte complet

Article pdf ci-dessous :

Argemone mexicana, Une des plantes sélectionnées dans le cadre de l’approche pharmacologique inversée

Ivan Addae-Mensah & all

Les médecines traditionnelles moteur de l’innovation dans la recherche en Afrique

Titre original : « Traditional medicines as a mechanism for driving research innovation in Africa »

Résumé :

Les résultats des récentes délibérations de haut niveau concernant la recherche en santé en Afrique et le développement économique mettent en évidence la nécessité d’un mécanisme d’appui à l’innovation en matière de santé sur le continent. Le Réseau africain pour l’innovation dans le domaine des médicaments et des diagnostics (African Network for Drugs and Diagnostics Innovation - ANDI ) consiste à promouvoir et à soutenir l’innovation en matière de produits de santé menée par les Africains afin de répondre aux besoins de santé publique de l’Afrique par la constitution de réseaux de recherche et le renforcement des capacités de soutien au développement humain et économique. ANDI est largement considéré comme le moyen de mettre en œuvre certaines de ces recommandations. L’Afrique a une formidable opportunité de tirer parti de l’expertise en matière de produits naturels et de médicaments traditionnels à l’appui de cet objectif de lancement de l’innovation. Cet article met en évidence les principales recommandations issues des forums d’experts convoqués par l’ANDI sur les défis, les opportunités et les perspectives d’investissement dans cet important domaine de recherche.

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Patrice N Mimche & all

Titre original : « The plant-based immunomodulator curcumin as a potential candidate for the development of an adjunctive therapy for cerebral malaria »

Résumé :

Les manifestations cliniques du neuropaludisme sont bien corrélées avec les principaux événements physiopathologiques sous-jacents survenant au cours d’une infection paludique aiguë, dont le plus important est l’adhérence des érythrocytes parasités aux cellules endothéliales conduisant finalement à la séquestration et à l’obstruction des capillaires cérébraux. La réduction du flux sanguin qui en résulte conduit à une hypoxie cérébrale, à une inflammation localisée et à la libération de molécules neurotoxiques et de cytokines inflammatoires par l’endothélium. La régulation pharmacologique de ces processus pathologiques par des molécules immunomodulatrices pourrait potentiellement être bénéfique pour la gestion de cette complication grave. Un traitement complémentaire des patients atteints de neuropaludisme par un composé immunomodulateur approprié possédant une activité antipaludique même modérée et capable de réguler négativement la production excessive de cytokines proinflammatoires et l’expression de molécules d’adhésion pourrait potentiellement inverser la cytoadhérence, améliorer la survie et prévenir les séquelles neurologiques. Les principaux programmes actuels de découverte de médicaments sont principalement axés sur de nouveaux objectifs et mécanismes d’action parasitaires. Cependant, la découverte de composés ciblant l’hôte reste un domaine de recherche sur la découverte de médicaments pour le traitement du neuropaludisme encore largement inexploré mais attrayant. Cet article aborde les propriétés de la curcumine, un modificateur immunitaire végétal, et son potentiel en tant que traitement complémentaire pour la gestion de cette complication.

Texte complet :

Texte pdf ci-dessous :

Marta Ferreira Maia
& Sarah J Moore

Insectifuges à base de plantes : examen de leur efficacité, de leur développement et de leurs expérimentation

Titre original : « Plant-based insect repellents : a review of their efficacy, development and testing »

Résumé :

Les répulsifs à base de plantes sont traditionnellement utilisés depuis des générations en tant que mesure de protection individuelle contre les moustiques en quête d’hôte. Les connaissances sur les plantes répulsives traditionnelles obtenues grâce à des études ethnobotaniques sont une ressource précieuse pour le développement de nouveaux produits naturels. Récemment, les produits répulsifs commerciaux contenant des ingrédients à base de plantes ont gagné en popularité auprès des consommateurs, car ils sont généralement perçus comme « sûrs » par rapport aux répulsifs synthétiques établis de longue date, bien que cela soit parfois une idée fausse. À ce jour, peu d’études ont suivi les directives standard du Programme d’évaluation des pesticides de l’OMS pour les tests de répulsivité. Il est nécessaire de poursuivre les études standardisées afin de mieux évaluer les composés répulsifs et de développer de nouveaux produits offrant un pouvoir répulsif élevé ainsi qu’une bonne sécurité pour le consommateur. Ce document présente un résumé des informations récentes sur les tests menés, l’efficacité et la sécurité des répulsifs à base de plantes, ainsi que les nouveaux développements prometteurs dans le domaine des produits insectifuges.
 
Texte complet :

Texte pdf ci-dessous :

Peinture moghol illustrant un homme en train de brûler des feuilles de neem près d’une rivière où des insectes piqueurs seraient présents (© Dr Sarah Moore)

Mis en ligne par La vie re-belle
 2/08/2019
 https://lavierebelle.org/quand-la-recherche-se-tourne-vers

 Documents

 a_call_for_using_natural_compounds.pdf
PDF 
 2_how_can_natural_products_serve_as_a_viable_source_of_n (...)
PDF 
 going_back_to_our_roots.pdf
PDF 
 4_whole_plant_extracts_versus_single_compounds.pdf
PDF 

Prévenir et guérir la malaria

L’expérience historique de certaines médecines traditionnelles notamment chinoise et africaine notamment d’une part, des recherches phytopharmacologiques et des études cliniques récentes d’autre part montrent qu’il serait possible de prévenir et de guérir la malaria à l’aide de certaines plantes de la famille des Artemisia.

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